André Chenu, 80 ans d’une vie de passion

Xavier Boudon 15 juin 2025

A quelques jours de la vente organisée par ses amis Emmanuèle Perron-Pette et Armand Pette à quelques kilomètres de sa ferme, André Chenu s’est éteint après un long combat contre la maladie. Parti de rien, le cheval vissé au coeur, il a bâti un élevage dont la renommée a largement dépassé les frontières de sa Normandie chérie.

La vie, il l’a croquée, dévorée, comme le feu de la passion du cheval qui l’a animé durant plus de soixante ans. Installé le 1er janvier 1977 au Haras du Plessis Massey, sur la commune de Mézidon Vallée d’Auge, au cœur du Pays d’Auge dans le Calvados, il a su dénicher d’innombrables bons chevaux et les placer sur la route du haut niveau. A commencer par la fameuse Bourrée, sf (1967, Nickel, aa x Khereddine, ps), grande gagnante internationale sous la selle d’Annick Chenu, l’épouse d’André, avant de produire quatre gagnants à 1,60m tous indicés au-dessus de 170, dont sans doute le plus célèbre partenaire d’Annick, P’tit Pol, sf (Corrent, sf), couple longtemps favori du public. Outre être une grande matrone, Bourrée était la cousine de Gnomide, sf (Quastor, sf), mère des internationaux Vondéen, sf (Le Condéen, sf), Udanum, sf (Laudanum, ps) et Gipsy de St Martin, sf (Le Condéen, sf), tous étalons.

Née chez Jean Lemarinier, Bourrée est issue de l’étalon Anglo-arabe Nickel, stationné alors à Saint-Lô et propre frère de Nithard, aa (Kesbeth, aa), l’un des chefs de race de l’Anglo-arabie. Indicée 119 à 6 ans, l’alezane fut mise à la reproduction une première fois à 3 ans pour sa propriétaire Colette Pittet, puis retourna au haras à 7 ans pour donner naissance au total à quatorze produits dont Narcotique, sf (Fair Play III, sf) ISO 177 avec Pierre Durand, finaliste à 5/6 ans, P’tit Pol, sf ISO 174, Rapide du Plessis, sf (Brilloso, sf) ISO 143 finaliste à 5/6 ans, Ulane du Plessis, sf (Narcos II, sf) ISO 175, finaliste à 5/6 ans, sa propre sœur Venus du Plessis, sf ISO 170, finaliste à 4/5/6 ans, Coktail du Plessis, sf (Palestro II, sf) ISO 159, finaliste à 4/5/6 ans, et sa propre sœur Flore du Plessis II, sf ISO 159. Avec plus de 130 performeurs internationaux sous l’affixe ‘du Plessis’, le couple Chenu peut s’enorgueillir d’avoir fourni une quantité tout simplement incroyable de bons et beaux chevaux, non seulement aux cavaliers français, mais aussi étrangers. La descendance de Bourrée a également irrigué la production Selle Français via ses étalons, notamment Padock du Plessis, sf (Kannan, kwpn) membre de l’équipe de France avec Timothée Anciaume et disparu l’an dernier, Aldo du Plessis, sf (Orient Express, sf – photo), Câlin du Plessis, sf (Quidam de Revel, sf), ou encore Chenu du Plessis, sf (Tenor de la Cour, sf). Cette lignée maternelle fameuse est d’ailleurs revenue en force sur le devant de la scène à travers un certain Hors La Loi II, sf (Papillon Rouge, sf), père d’Untouchable 27, kwpn, père d’Untouched, lui-même père du crack United Touch S… !

Le savoir-faire de l’Homme de cheval qu’était André Chenu a ainsi marqué l’Histoire des sports équestres, autant par la pertinence de ses choix que par sa discrétion légendaire. Découvreur de chevaux talentueux comme Orient Express, sf (Quick Star, sf) puis Timon d’Aure, sf (Mylord Carthago, sf), tous deux devenus par la suite de grands gagnants internationaux, il a également su faire éclore des cavaliers, le dernier en date étant Alexis Deroubaix dont l’association avec Timon d’Aure fit des merveilles. Bien que non issu d’une grande famille d’éleveurs, André Chenu a bâti ce dont il rêvait. Un élevage, son élevage, envié par tous, dont les descendants poursuivront son œuvre encore de longues années. Hasard du calendrier, ses amis de longue date, Emmanuèle Perron-Pette et Armand Pette, organisent une vente aux enchères mercredi 18 juin, avec parmi les lots proposés deux arrière-petites-filles de Bourrée, Odisea HDC, sf (Casallo Z) et Délice du Plessis, sf (Padock du Plessis, sf) ainsi que la fille de cette dernière par Ermitage Kalone. L’occasion d’acquérir une génétique exceptionnelle et ainsi poser les bases d’un élevage à fort potentiel.

Nos pensées vont bien évidemment à Annick, sa femme et son soutien indéfectible, indissociable de ses nombreux accomplissements, et à l’ensemble de ses proches. L’élevage français perd un œil, un talent, une volonté viscérale de porter haut les atouts du Selle Français.

Crédit photo à la une: Aldo du Plessis et Alexis Deroubaix - photo : Xavier Boudon