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L’Expérience

Dynamix de Belhème, la pépite française de Steve Guerdat

Sylvia Flahaut 20 juillet 2023

Depuis l’an dernier, sous la selle du cavalier suisse Steve Guerdat, elle n’a laissé personne indifférent : Dynamix de Belhème, dix ans, est entrée dans la cour des grands et a notamment participé à la victoire de la Suisse dans la Coupe des nations du CSIO5* de Falsterbo le week-end dernier. Beaucoup voient d’ailleurs en elle la monture qui permettra au Suisse de revenir dans le top 10 des meilleurs mondiaux.

Pleine de souplesse, dotée d’un coup de garrot et d’un passage de dos impressionnants, la jument baie, élastique, franchit les obstacles les uns après les autres, avec une facilité déconcertante. Elle a brillé l’année dernière sur les plus belles pistes européennes : gagnante d’une épreuve cotée à 1,45 mètre à Vejer de la Frontera début 2022, puis deuxième du Grand Prix Coupe du monde de Stuttgart à la fin de cette même année, avant de remporter le Grand Prix 4* de Vejer de la Frontera en février dernier, Dynamix a progressivement été mise à l’épreuve par le Suisse. Il faut dire que le cavalier fonde de grands espoirs en sa jument Selle Français, fille de Snaike de Blondel et Soudaine du Montet (Cornet Obolensky, Bwp). Il avait d’ailleurs confié à notre confrère Alban Poudret, à Genève, que « Dynamix a quelque chose de spécial, des qualités intrinsèques exceptionnelles, comme aucun autre cheval dans ma carrière, hormis peut-être Tepic La Silla (Akteur, Nwp), que je n’avais eu que quelques semaines, pour les championnats d’Europe 2003 ». Interrogé sur les Jeux Olympiques de Paris, Steve Guerdat avait d’ailleurs donné le nom de sa crack jument pour une éventuelle participation. Une monture qu’il connaît par cœur, puisqu’il l’entraîne depuis qu’elle a cinq ans. Revenons d’ailleurs un peu en arrière, pour connaître l’histoire de Dynamix.

Une opportunité nommée Soudaine du Montet

C’est en 2010 que l’éleveur de la toute bonne Dynamix, Frédéric Aimez, achète Soudaine du Montet (Cornet Obolensky, Bwp) à Brigitte et Hubert Mazeaud, qui mettent un terme à leur activité d’élevage. « J’ai pu faire l’acquisition de Soudaine par le biais de Michel et Eliane Ruel, qui ont toujours été de très bons conseils », indique Frédéric Aimez. « Soudaine avait quatre ans, c’était une très belle jument, assez grande, baie brune, avec une belle sortie d’encolure, un garrot assez prononcé et beaucoup de souplesse. On aurait dit une Pur-sang. Elle avait l’œil malin, elle me semblait très intéressante pour l’élevage… Je crois qu’elle était issue de la première génération de Cornet Obolensky en France. Dans les années 2000, ce dernier était encore assez peu connu. » L’année suivante, en 2011, Frédéric Aimez met Soudaine à la reproduction. « Pour le croisement, j’ai pu bénéficier de l’avis de Michel Ruel, qui m’a orienté vers Snaike de Blondel, un fils du Holsteiner Calvaro. J’ai de suite été d’accord car Snaike est issu d’une souche intéressante, avec Olympic Champeix comme mère, par Vondeen. » En 2012, Frédéric Aimez a un petit mâle, Cornetaux de Belheme. « Il était très souple, très léger. On aurait pu croire qu’il manquait de force, mais il a quand même tourné jusqu’en épreuves cotées à 1,40 mètre. » Satisfait du premier produit de Soudaine, Frédéric Aimez décide de mettre une nouvelle fois Snaike de Blondel sur sa fille de Cornet.

“Elle n’était pas très bien rangée devant, mais elle avait un tel coup de garrot, qu’elle n’avait pas vraiment besoin de plier ses genoux.”

Révélation sur les barres

L’année suivante, une pouliche voit le jour : Dynamix. « Elle était baie et ressemblait beaucoup à Cornetaux et à sa mère. Mais elle avait un petit quelque chose en plus. Elle se déplaçait très bien, avait une belle tête et tapait dans l’œil. » La pouliche grandit au milieu de ses semblables dans les prairies de Haute-Normandie jusqu’à ses trois ans. « À cet âge, nous avons décidé, avec ma fille, de la faire sauter en liberté. Au premier saut, j’ai vu que c’était quelque chose de phénoménal. J’ai même dit à ma fille d’aller chercher son téléphone pour la filmer. Dynamix était amusée par le fait de sauter, il n’y avait aucune hésitation. Elle n’était pas très bien rangée devant, mais elle avait un tel coup de garrot, qu’elle n’avait pas vraiment besoin de plier ses genoux. » La deuxième séance de saut en liberté, quelques semaines plus tard, se passe encore mieux et Frédéric Aimez se dit alors qu’il aura du mal à garder sa pouliche, tant celle-ci lui semble douée. Il faut dire que Dynamix jouit d’une jolie lignée : elle est la petite-fille maternelle de Jenlah des Yvers (Arpege Pierreville), qui a notamment produit Vitorio du Montet (Lando, DWB), ICC 148, né chez la famille Mazeaud et qui a tourné jusqu’en CCI5*-L avec le Tricolore Maxime Livio. « J’aimais particulièrement la souche de Soudaine, car j’avais eu Psyché, la mère d’Arpège Pierreville, chez moi à la fin de sa carrière. » Compte tenu de la qualité de la jument, Frédéric Aimez décide de la mettre à la reproduction et réalise deux transferts d’embryon avec Quamikase des Forêts, alias Zirocco Blue VDL. En 2017, Frédéric Aimez obtient un mâle, Hizyblue de Belheme et une femelle, Hizyna, qu’il a conservée à l’élevage.

Des succès selon différentes souches

À quatre ans, Dynamix commence à faire ses premiers pas en compétition. « Elle n’a pas beaucoup tourné cette année-là », précise Frédéric Aimez. « Nous avions choisi de privilégier la carrière d’élevage de la jument. À cinq ans, elle a fait un peu plus de tours. Elle faisait toujours les choses très bien, surtout au vu du peu d’entraînement qu’elle avait à la maison. » Après le CIR de Saint-Lô, Antoine Charlot et Juan Ramos, aujourd’hui associés Fences, contactent Frédéric Aimez pour acheter Dynamix. Les essais se passent bien et la jument est finalement acquise. Direction la Suisse. « Dans un premier temps, elle est partie dans les écuries de Willi Melliger, en étant destinée à ses enfants. Puis, elle est rapidement arrivée dans les écuries de Steve Guerdat. » Depuis, le cavalier suisse façonne sa pépite. « Nous avons suivi sa progression d’assez loin au départ, puis nous sommes entrés en contact avec l’équipe de Steve Guerdat. Ce sont des personnes fabuleuses et nous n’avons que des bonnes nouvelles de la jument. Elle a connu une progression régulière et ce qu’elle fait aujourd’hui est formidable. » Comme il l’avait fait avec Utchan de Belheme (Calvaro, Holst), qui courait à haut niveau sous la selle de l’Irlandais Mark McAuley, Frédéric Aimez suit les exploits de sa protégée lors de ses sorties en compétition. « J’ai eu de la chance avec Calvaro et ses fils, notamment Snaike de Blondel, qui m’ont donné Utchan, ISO 164, et Dynamix. » Frédéric Aimez a également donné naissance au crack de Jean-Lou Bigot, Aktion de Belhème (Lauterbach, Old), ICC 152. Ces trois ambassadeurs de l’élevage de Belhème sont issus de trois souches différentes : une belle satisfaction pour l’éleveur normand, qui s’illustre aussi bien en saut d’obstacles qu’en concours complet.

La suite de l’histoire

Lors des années où il possédait encore Dynamix, Frédéric Aimez, en éleveur averti, n’a pas manqué de lui donner une descendance. Outre Hizyblue et Hizyna de Belheme, nés en 2017, Frédéric Aimez a eu une autre fille de Dynamix : Iyna de Belheme, née en 2018, et issue de Padock du Plessis, ainsi qu’un mâle en 2019, Jaimix de Belheme (Querlybet Hero). Dynamix est donc déjà grand-mère ! Hizyna a donné à Frédéric Aimez un mâle issu du Holsteiner Cooper vd Heffinck et une femelle du Oldenbourg Balou Star l’année dernière. Quant à Iyna, elle donnera en 2023 un produit de Happy Day d’Iscla et un autre de Balou Star, déjà vendu en Allemagne. Frédéric Aimez écrit donc la suite de l’histoire, tandis que Dynamix continue sa progression vers le dernier palier du haut niveau. « J’aime prendre le temps, je ne l’ai pas encore mise dans le dur », a également indiqué Steve Guerdat à Genève. « Elle a déjà fait ses preuves en 5*. C’est une princesse, elle est assez unique dans son caractère, dans sa façon de faire […]. Elle a toutes les qualités pour le haut niveau, mais entre les bons chevaux et les chevaux d’exception, c’est le temps qui montre la différence, la route est encore longue. »

Photo : Dynamix de Belhème et Steve Guerdat, ici dans la Coupe des nations de Falsterbo, où ils signaient un double sans-faute. Crédit : FEI/Leanjo de Koster.