Foxy, Folie, Candy, les joyaux de la reine Royaltie III (Part 1/3)

Une crack à près de 650 000 euros de gains en 2024, Foxy de la Roque, son grand-oncle, Candy de Nantuel*GFE, avec trente produits lors de la dernière Grande Semaine, sa petite-nièce, Folie de Nantuel, arrivée chez Scott Brash… Voilà une famille toujours brillante chez ses éleveurs d’origine, cultivée par le Haras de la Roque sans rien perdre de son potentiel génétique, qui décidément mérite de l’explorer en remontant à la reine Royaltie III.
Au départ, Kambas, une Pur-sang irlandaise importée. Une pratique assez courante dans les années 1960 consistait en effet à importer d’Irlande des juments Pur-sang pour les faire produire en France. Le but n’était pas de constituer des lignées, mais plutôt d’engendrer rapidement des chevaux de sport, utilisables par le plus grand nombre. Kambas, née en 1961, arrière-petite-fille du Pur-sang fondateur Son in Law, fut ainsi importée de la verte Érin pour l’élevage du Cher dans la Creuse.
Royaltie III, un mélange de sangs prêt à bondir
Croisés exclusivement à des étalons anglo-arabes, les sept produits de Kambas sont inscrits au stud-book AA. Parmi les choix des bons étalons anglo-arabes de la circonscription de Pompadour, se trouve l’intéressant Alizé, un chic alezan très bien né. En effet, Alizé est le fils de deux sommités : son père est le chef de race Nithard et sa mère, Sissie du Pelaud, est l’une des plus influentes juments AA via ses remarquables fils étalons Henaud, Samuel, Brick, Danis et Alizé. Du croisement d’Alizé avec Kambas naissent deux propres sœurs : Alikame et Lizka. Née en 1973, Lizka est la grand-mère du petit bai Tatchou (Faristan, AA x El Aid), champion du monde des 7 ans de concours complet avec Nicolas Touzaint, puis grand gagnant en CCI4*, ICC 188/07. Le chemin de la sœur aînée, Alikame (née en 1971), prend la direction de l’élevage d’Antoine Sorel, dans le Cher. L’éleveur choisit de croiser à quatre reprises sa jument anglo-arabe avec l’étalon du Haras national de Blois, Kaolin de Lyre (voir encadré). Là encore, deux propres sœurs se démarquent : Queen Lady IV, très bonne gagnante, ISO 140/94, et Royaltie III. Si cette dernière n’a pas pu exprimer son potentiel sportif, c’est bien elle qui marquera l’histoire via sa descendance.
Faire fortune bon cœur
Issue de très bons courants de sangs anglo-arabes, Pur-sangs et Selle français, Royaltie III était un excellent point de départ pour débuter un élevage de chevaux de sport. Mais cela, Jacques Gouin et sa fille Marie-Laure Deuquet ne le savaient pas encore en 1989. Dentiste et passionné d’animaux, Jacques Gouin est installé avec ses trois filles et son épouse dans la propriété venant de ses beaux-parents. Situé à Corquoy, dans le Cher, le domaine de Nantuel est un très bel ensemble historique avec une maison bourgeoise, des bâtiments d’élevage et même une ancienne chapelle, le tout magnifiquement entouré d’une cinquantaine d’hectares. Mordue d’équitation, la jeune Marie-Laure se passionne pour les chevaux et la compétition. Il faut donc équiper l’amazone et c’est ainsi que Patrick Sorel, fils d’Antoine, propose à Jacques Gouin la petite alezane Royaltie III. Jacques Gouin, débutant en matière de chevaux, a du mal à maintenir sa jument en état. Il la nourrit de plus en plus, mais sans amélioration probante. Royaltie III déclenche une fourbure et, comble du destin, le vétérinaire de l’époque (peu spécialisé) se trompe de diagnostic : il penche pour une tendinite et conseille d’immobiliser la jument tout en continuant de nourrir fort. Résultat : elle devient inapte pour le sport mais en condition acceptable pour l’élevage. Le destin décide donc que Royaltie III va se consacrer à la reproduction et la famille Gouin va se lancer dans l’élevage, avec l’arrivée en 1989 du premier poulain à Nantuel.

Travaillée avec soin par la famille Deuquet, la souche de Royaltie, disparue en 2000, s’avère excellente et livre pléthore de bons chevaux. ©Coll. Privée
MARIE-LAURE DEUQUET NOUS RACONTE Cultiver et greffer, deux savoirs essentiels depuis toujours dans l’agriculture. C’est cette capacité des Deuquet à faire naître cette souche, la cultiver et la maintenir d’actualité, pendant que le Haras de la Roque réussissait la greffe de cette souche sur son programme d’élevage, qui nous intéresse ici : la préservation d’un savoir-faire d’éleveur qui se transmet chez un autre en trouvant une voie pour se perpétuer. “Cet élevage, c’est l’idée de mon père, il voulait des chevaux modernes, avec du sang, du sang, du sang. Même si, régulièrement, il faut apporter de la force. Ce que nous essayons de ne pas perdre de vue, explique Marie-Laure Deuquet. Mon père a utilisé très tôt Quidam de Revel, qu’il adorait, et s’est très vite rendu compte que l’inbreeding sur Quidam fonctionnait. C’est pour cela qu’il est allé à Luidam. Il voulait mettre les juments à Guidam, qui est mort cette année-là. Il s’est renseigné auprès de Richard Levallois, qui commençait à distribuer Luidam. Richard disait qu’il ne pouvait rien dire sur le cheval, qu’il n’avait pas de recul. Alors mon père lui a rappelé une phrase de Germain Levallois : ‘Quand tu as une idée, il faut la suivre !’ Et les juments ont été saillies par Luidam !”
Photo mise en avant : L’incroyable Foxy de la Roque, gagnante de quatre Grands Prix 5* et un 4* en quatre mois avec Victor Bettendorf. ©Giampaolo vimercati
À SUIVRE…
Par Lionel Saivres