Galan de Sauvagère, le roi des doublés

Xavier Boudon 11 octobre 2025

A 31 ans, le charismatique partenaire de Nicolas Touzaint est parti rejoindre son compagnon de retraite, Hildago de l’Ile, au paradis des stars du concours complet mondial. Ce fils de Joly Jumper possède l’un des plus beaux palmarès, avec un double titre de Champion d’Europe individuel et l’or olympique par équipes conquis de haute lutte à Athènes.

Le gris n’a connu qu’un seul pilote en compétition, l’Angevin Nicolas Touzaint. Avec lui, il débuta à 6 ans, d’abord en saut d’obstacles puis en concours complet. Cette année-là, ils remportent leur premier CIC1* à Sandillon, puis s’adjugent le titre mondial au Lion d’Angers, en individuel et par équipe avec le stud-book Selle Français. L’année suivante, ils s’imposent dans le Championnat de France des chevaux de 7 ans avant de doubler la mise au Mondial du Lion, un nouveau double titre à la clé. Une première pour un cheval et un cavalier français ! A 8 ans, Galan et Nicolas remportent le CCI2* de Punchestown (IRL). Comme un signe…car un an plus tard, ils s’imposent à la surprise générale au Championnat d’Europe, or individuel et argent par équipes, après avoir terminé 2e du Championnat de France de Saumur. Incroyable ! Logiquement, le duo est sur les tablettes du sélectionneur pour les JO d’Athènes. L’équipe, emmenée par Jean Teulère et Espoir de la Mare (couronnés entre temps Champions du Monde individuels en 2002 à Jerez), termine en or après une affaire de volte. Nicolas et Galan finissent 8e, deuxièmes meilleurs français (Jean et Espoir 4es). Les saisons suivantes, les victoires s’accumulent, avec notamment un titre de Champion de France 2007. Le couple s’envole pour Pratoni del Vivaro (ITA) où se tiennent les Championnats d’Europe. Après le cross (et une belle hécatombe générale), la France pointait à la 2e place derrière la Grande-Bretagne, et Nicolas devançait de moins d’un point Zara Phillips (désormais Tindall). La Championne du Monde en titre (Aix-la-Chapelle 2006) entra en piste pour l’ultime parcours de saut d’obstacles. La tension était à son comble. La paire Britannique s’effondra littéralement. Deux barres, un refus, 19 points de pénalité…tandis que Nicolas et Galan signaient un cross et un CSO parfaits. Une performance qui les faisait entrer un peu plus dans la légende !

Le sang d’Ukase

Côté origines, ce galant gris se réclame d’un certain Joly Jumper. Certes, sa notoriété n’égale pas celle de son alter ego de bande dessinée (dont le nom s’écrit avec deux « L »). Joly Jumper était un fils du bon Ukase, par le chef de race Ibrahim. Réputé transmettre une excellente locomotion (son BDR positif en atteste !), Ukase donna le fameux Godelureau, 8e des Championnats d’Europe de concours complet 1986 avec Jean Teulère, et Fukase Grimeu, membre de l’équipe de France aux Championnats d’Europe de saut d’obstacles avec Hubert Parot. Sur le volet maternel, nous retrouvons du sang via son père de mère Hornet, ps (Nepenthe, ps), le tout croisé à une lignée maternelle Demi-Sang. La soeur utérine (et 3/4 soeur en réalité) de Joly Jumper, Gold Rose, sf (Ibrahim, ds), ISO 168, est la mère des étalons Hornet Rose, sf (Quidam de Revel, sf) né aux Pays-Bas pour Frans Augustinus van der Lee, ainsi que Turban Rose, sf (Grand Veneur, sf) et Sable Rose, sf (Uriel, sf) nés chez Solange Lefèvre. Bien que peu connue et passée de mode, cette souche maternelle a eu son heure de gloire. D’ailleurs, avant même l’avènement de Galan de Sauvagère (qui reste son meilleur produit, ICC 193 !), Joly Jumper avait déjà été utilisé pour produire en CCE et dressage, comme en attestent ses produits Okapi de Saane ICC 158, Djina ICC 166, Turbulent de Canon IDR 142 et membre de la Grande Reprise du Cadre Noir de Saumur, Virus Fontenoi IDR 143, Vivien III IDR 141, Fleur de Pail IDR 148, etc.

Des coureurs de fond

Sur le plan maternel, Galan descend d’une lignée 100% pur-sang. Sa mère Douce Julia, par Julius Caesar, est née chez Daniel Bellay à Saint Germain la Campagne (Eure). Elle n’avait pas convaincu son propriétaire et entraîneur Bernard Renard. Après trois courses infructueuses à 3 ans, sa carrière fut terminée. Ce n’est que quelques années plus tard que Michel Leroy, lui aussi éleveur dans l’Eure, la récupéra pour tenter des croisements ‘sport’. Elle n’eut que quatre produits, dont Galan et Hisis de Sauvagère, sf (Brazilia Paluelle, sf) ISO 110. Aucune des deux femelles a qui Douce Julia donna naissance n’eut de descendance, avec un essai infructueux sur Hisis et une morte prématurée pour sa soeur utérine.

Si sa fille n’avait pas démontré de grandes aptitudes sur hippodrome, Zone Douce, ps (Amadou, ps) avait été plus convaincante. Trois saisons à son actif, une victoire sur 2500m, deux 2e places, cinq 3e places laissaient espérer une belle descendance. Seule sa première fille Douce River, ps (Olantengy, ps) laissa une production intéressante, toujours en plat. L’analyse des performances des collatéraux montre une appétence forte pour les distances longues, jusqu’à 3900m comme ce fut le cas pour la jument Regardless, ps (Rheffic, ps), victorieuse sur ce format.

Le souffle, le courage, l’endurance, le mental de guerrier, toutes ces qualités qui firent de Galan de Sauvagère un cheval extra-ordinaire, en totale symbiose avec son cavalier. A 31 ans, dont 15 d’une retraite bien méritée, il rejoint son copain de pré Hildago de l’Ile au Panthéon des rois de la discipline.

Nos pensées vont bien évidemment à Nicolas Touzaint, sa famille et tous ceux qui s’occupèrent de ce champion hors norme.

Crédit photo à la une: Galan de Sauvagère et Nicolas Touzaint aux JO d'Athènes 2004 (crédit : PSV)